Je rencontrai Luna le 29 février 2016. Il pleuvait ; le tonnerre grondait ; les fenêtres grinçaient. J’étais alors âgée de 29 ans et j’habitais une petite maison au fin fond de la campagne. Ce soir –là je lisais dans ma chambre un vieux manuscrit sur le Moyen-Age quand j’entendis frapper à la porte. Je cru d’abord que c’était dû au vent. Mais (bizarrement) j’allai vérifier la porte. Lorsque j’ouvris celle-ci, je me retrouvai face à une jeune fille transie de froid. Elle grelotait et ne portait qu’un vieux pull et un pantalon rapiécé. Je failli refermer la porte, terrorisée. Mais, me rendant compte que l’eau entrait dans la maison, je fis entrer la jeune fille. Je lui donnais une couverture chaude et des vêtements mieux adaptés au temps. Quand elle fût bien au chaud, je lui servis un peu de soupe. Enfin je m’assis et l’observai.
C’était une jeune fille aux cheveux noirs de jais. Ses yeux gris-bleu semblaient lointains. Mais au fond de ses pupilles on apercevait cette petite lueur d’intelligence propre aux savants. Elle était très maigre et semblait fragile. Mais la vivacité et la rapidité de ses mouvements étaient stupéfiantes. Sa démarche était légère et gracieuse. Elle n’avait pas pipé mot depuis qu’elle était entrée dans la maison. Elle mangea très lentement de telle manière qu’on avait l’impression qu’elle faisait tout au ralenti. C’était là une bien singulière personne.
Quand elle eût fini de manger, je commençai à la questionner : « Comment t’appelles-tu ? » De longues minutes s’écoulèrent. Je répétai la question sans succès. Peut-être ne comprenait-elle pas le français ?, me dis-je. Je réitérai la question en anglais, en espagnol, en allemand et même en chinois sans résultat. Je commençai à m’énerver. « Luna, répondit-elle soudainement.». Sa voix fluette me surpris. On aurait dit un souffle. Mais je continuer mon interrogatoire : « Quel âge as-tu ?
- Dix-huit ans, répondit-t-elle »
Je fus un peu surprise car je la croyais plus jeune. Elle semblait si frêle !
« D’où viens-tu ?, continuai-je. »
Aucune réponse.
« Où vas-tu ?, enchaînai-je.
- Nulle part »
C’était une réponse inattendue.
« Depuis quand voyages-tu ?
- Six mois.
- Comment te nourris-tu ?
- Mes vivres sont finis il y a deux mois alors je fais du porte à porte.
- Pourquoi voyages-tu ?
- Pour trouver mon chemin »
Cette fille attirait curiosité d’écrivaine.
« Tu peux rester aussi longtemps que tu veux, lui dis-je »
Et c'est ainsi que je commençai ma longue cohabitation avec Luna.

L’ile
Je fus très heureuse quand Luna accepta de rester. Au début, j’ai pensé que je pourrais lui poser plein de questions. Grave erreurs de ma part ! Elle s’attacha très rapidement à ma collection de livres dont j’étais d’ailleurs très fier. Cette collection ne comptait pas moins de 13 000 livres tous en bon états et soigneuses rangés dans de grandes étagères par ordre alphabétiques. Je dois avouer que c’est en fait de ma grand-mère que j’ai hérité les trois quart de ces livres et qui emménageait la salle de lecture.
Luna adorait apparemment lire et quelque fois elle me posait des questions sur tout et n’importe quoi. Ces questions étaient toujours étranges, mais c’était les seules fois où elle ouvrait la bouche.
Il me fallut longtemps pour comprendre d'où elle venait. Elle, qui me posait beaucoup de questions, ne semblait jamais entendre les miennes. Ce sont des mots prononcés par hasard qui, peu à peu, m'ont tout révélé. Ainsi, un jour comme on parlait de Robinson Crusoé, elle me dit : « C’est bien de vivre sur une île. Il y a beaucoup de poisson et c’est calme
- Est-ce-que tu as déjà vécu sur une île ?
Elle ne répondit pas.
- Je pense qu’on se sent un peu seul sur une île, continuai-je
- La solitude, c’est aussi triste que beau …»
Et elle s'enfonça dans une rêverie qui dura longtemps. Elle observa le livre Robinson Crusoé. Sa couverture était en cuir marron. Il était assez volumineux.
Vous imaginez combien j'avais pu être intrigué par cette demi-confidence sur "les îles". Je m'efforçai donc d'en savoir plus long: « D'où viens-tu? Où est-ce chez toi? , demandai-je encore »
Elle me répondit après un silence méditatif : « Ce qui est bien avec les livres c’est qu’ils ne parlent pas
- Je pourrais t’en donner une vingtaine quand tu partiras, répondis-je légèrement blessée par cette allusion.
Elle parut ennuyée par quelque chose :
- Je ne pourrais pas les transporté et en plus chez moi c’est petit.
Et, avec un peu de mélancolie, peut-être, elle ajouta:
- Ils vont s’abimer avec la marée.

Quelque part?

J’avais appris deux choses très importantes : d’abord que Luna venait d’une île et que cette île était très petite. Ça ne pouvait pas m'étonner beaucoup. Je savais bien qu'en dehors des grandes îles comme la Guyane, Hawaï, Cuba, qui sont cartographier, il y en a des centaines d'autres qui sont quelquefois si petites qu'on a beaucoup de mal à les apercevoir sur les planisphères. J’ai des sérieuse raisons de croire que Luna viennent d’une île situé sur équateur d’abord à cause de la couleur légèrement halés de sa peau et de ses cheveux noir de jais. J’ai fait de nombreuses recherches pour situés exactement cette îles mais je vous épargne tous ses chiffres scientifiques. Vous demandé surement pourquoi j’ai autant recherché cette île. Je n’en moi-même pas la moindre idée.

Volcan

Chaque jour j'apprenais quelque chose sur l’île, sur le départ, sur le voyage. Ça venait tout doucement, au hasard des réflexions. Ainsi un jour, Luna qui lisait un livre sur les volcans me demanda soucieuse : « Les volcans prennent combien de temps pour s’éteindre ?
-Je crois que ça dépend des volcans, répondis-je évasivement car ce sujet ne m’intéressait guère.
-Dommage, dit- elle tristement »
Je ne compris pas pourquoi c’était dommage. Mais Luna ajouta:
-J’espère que le mien va bientôt s’éteindre.
-Il y a un volcan chez toi ?, demandai-je soudainement intéressée.
-Oui, répondit-elle.
Je restai tout d’abord bouche bée. Moins pas la réponse elle-même que par le fait qu’elle m’ait répondu directement à ma question.
-Il est assez difficile à entretenir, continua-t-elle indifférente à ma surprise.
-Comment fais- tu pour entretenir quelque chose d’aussi grand qu’un volcan ?, m’étonnai-je dans ma grande naïveté.
-Vous avez l’air surprise…
Luna eut un très joli éclat de rire qui m'irrita beaucoup. Je désire que l'on prenne mes questions au sérieux. Puis elle ajouta avec sagesse:
-Les volcans avant d’être grands, ils sont d’abord petits.
C’est ainsi que j’appris qu’elle vivait sur une île volcanique.

Pleine lune

J’ai compris peu à peu la petite vie mélancolique de Luna. Un soir, elle me proposa de sortir regarder le ciel. Maintenant habituée à ses bizarreries, je l’accompagnai dehors. Je frissonnai : c’était la pleine lune. Tout le monde a déjà entendu tout petit les histoires de loup-garou et de vampires. Moi, j’en garde de très mauvais souvenirs. Je voulus proposer à Luna de rentrer dans la maison mais je fus stopper par l’air ravie qu’elle affichait.
Un sourire se dessinait sur ses lèvres ; ses yeux étincelaient ; ses cheveux semblaient scintillés. Elle observait la lune qui trônait seule dans le ciel. Ne voulant pas gâcher ce moment de contemplation, je fus résigné à m’assoir près d’elle dans l’herbe. Alors je me rendis compte (et il serait stupide de ne pas s’en rendre compte) que son nom avait directement un rapport avec la lune. J’envisageais toute les suppositions possibles sur l’origine de son nom quand elle s’exclama soudainement :
« J’adore la pleine lune. » Je ne trouvais rien à lui répondre.
« Je n’aime pas les éclipse lunaires, continua-t-elle sur sa lancée.
-Tu en as déjà vu une ?, interrogeai-je.
Elle acquiesça en silence.

Départ

J’appris bientôt que c’est à cause de l’éclipse que Luna parti de chez elle. L’éclipse avait duré une heure. « J’ai eu peur que la lune ne revienne plus, m’a confié Luna en riant ». Elle avait réfléchi dans le noir et c’était demandé quel était son but. Sur sa petite île, elle n’avait pas beaucoup d’activités. Si elle ne péchait pas, elle lisait le Petit Prince ou Les Misérables, deux livres qu’elle avait en sa possession par je ne sais quels moyens. Selon elle chaque être-humain marche sur un chemin qu’il trace lui-même. Personne ne sait réellement quel chemin il suit. Sinon on s’ennuierait tous !« Comme je n’ai rien à faire sur mon île, je me suis dit que je pourrai chercher quel était mon chemin, me dit encore Luna. » Je crois qu'il profita, pour son départ, d'un banc de dauphins qui se dirigeait vers l’ouest.

Le vieux comte

Les dauphins la conduire sur une jolie petite île. Il y avait sur ce bout de terre une grande maison aux murs blancs entourés de plusieurs jardins mal entretenus qui changeaient de couleur au gré des saisons. Le sable fins était presque blanc et les arbres étaient plein de fruit exotique. Sur cette île qui était dix fois plus grande que celle de Luna, il y avait un vieux comte anglais qui vivait seul. Le comte était un peu sourd. Il avait semblait il oublié comment s’occuper de soi et portait de vieux habits salles. Quand il aperçut Luna, il s’exclama : « Vous voilà servante ! Pouvez-vous m’apporter mon déjeuner ? Ça fait des lustres que je n’ai pas mangé un vrai breakfast. » En effet, le vieil homme était très maigre. Luna lui confectionna une salade de fruit exotique bien qu’elle n’apprécia guère qu’on l’ait prise pour une servante. Le vieil ne la remercia et s’en tenir compte du fait qu’il soit écouté, il lui parla de sa vie antérieure. Luna s’ennuya rapidement car il n’y avait pas de livres sur cette île et que le comte ne faisait que parler.
-Je n'ai plus rien à faire ici, dit-elle au roi. Je vais repartir!
-Ne pars pas, répondit le vieillard qui était si content d’avoir de la compagnie. Je te nommerai chef cuistot.
-Je préparerai pour qui ?
-Pour nous deux.
-Ce n’est pas amusant de préparer pour deux personnes, répliqua Luna.
-Mais tu pourrais faire du homard, continua le comte déchu, c’est bon le homard.
-Je n’aime pas le homard.
Luna s’en alla en laissant le comte qui parlait tout seul. Avant de monter sur un banc de baleine, elle traça sur le sable : CHEMIN DE LA SOLITUDE.

Le gros Monsieur

La seconde île était habitée par un gros bonhomme imbus de sa personne. Quand il aperçut Luna, il se mit en colère et dit : « comment oses-tu marcher sur mon îles ?, tu vas la salir !
-Mais une île n’appartient à personne, lui dit Luna.
-C’est mon île à moi, continua l’homme qui devenait rouge.
Luna qui ne désirait pas discuter s’assis sur un rocher dans la mer. Le gros monsieur devint cramoisi et hurla : « Comment oses-tu monter sur mon rocher ?
-Ce n’est pas toi qui as mis ce rocher-là, rétorqua Luna énervé.
-Non, mais il est là pour moi, répliqua l’homme, et tu devrais me vouvoyer, jeune sotte.
-Sachez monsieur que je suis moins sotte que vous, objecta la jeune fille.
Luna descendit du rocher, ramassa une pierre et grava sur le rocher : CHEMIN DE LA VANITE.